La mise en place d'évaluations diagnostiques des élèves de CP et de 6è apparaît comme une nouvelle surprise en cette période de rentrée scolaire. S'il est clair que l'évaluation est indissociable de l'enseignement, la généralisation de ce dispositif émergeant sans prendre en compte les contextes spécifiques de chaque école nous alerte fortement et le SI.EN UNSA a jugé bon de s'adresser au ministre.
Dès la prise en charge de vos fonctions, vous avez affirmé votre volonté de bâtir l’École de la confiance. Notre organisation syndicale a immédiatement soutenu votre démarche qui est, à notre sens, la seule compatible avec les enjeux auxquels le service public d’éducation doit faire face.
Par la suite, plusieurs mesures que vous avez initiées nous ont inquiétés et nous ne nous en sommes pas cachés. Cependant, vous avez su nous convaincre de votre volonté de maintenir votre cap initial en apportant des assouplissements ou des précisions qui nous ont rassurés.
Il n’en demeure pas moins que des décisions comme la possibilité de revenir à la semaine de quatre jours, la remise en cause partielle du dispositif « plus de maîtres que de classe », ou encore la suppression de nombreux emplois aidés, sont autant d’occasions d’introduire du trouble dans le milieu éducatif qui n’a pourtant guère besoin de cela…
Dans le contexte difficile d’une rentrée scolaire où l’ambition est plus aisément perceptible que les moyens d’atteindre les objectifs fixés, l’ajout en dernière minute d’une nouvelle contrainte relative à l’évaluation introduit une forte perturbation.
Les inspecteurs sont, certes, les premiers à affirmer que l’évaluation est indissociable de l’enseignement et qu’il n’y a aucune raison d’en craindre des effets négatifs, dès lors que ses conditions de mise en œuvre sont bien maîtrisées. Il semble donc tout à fait judicieux de proposer aux enseignants des outils d’évaluation diagnostique de leurs élèves et la centration sur le CP et la 6e peut s’entendre, même si elle apparaît comme discutable. En revanche, imposer à tous les enseignants de faire appel dès cette rentrée à un outil encore imparfait revient à prendre le risque de rallumer une querelle dont nous avons déjà vécu les effets dévastateurs il y a quelques années.
Bien sûr, l’analyse des résultats d’une évaluation standardisée peut faciliter la mise en place d’un pilotage pédagogique de proximité pour les inspecteurs, mais elle peut aussi conduire à de regrettables dérives qui mettent les enseignants en concurrence au lieu de les aider à mutualiser des solutions.
Au bout du compte, une contrainte comme celle qui est envisagée aujourd’hui s’inscrit en totale contradiction par rapport au concept d’une école de la confiance. Doter les enseignants d’outils en leur laissant le choix pour leur mise en œuvre, les faire accompagner par les inspecteurs et leurs équipes en recherchant de nouvelles modalités de formation, voilà ce qui relèverait réellement de l’école de la confiance.
Pour sa part, notre organisation engage fortement ses adhérents à éviter toute forme de pression en direction des enseignants quant à l’utilisation de ces évaluations. Elle leur recommande aussi de bannir toute exploitation des données transmises qui pourrait conduire à une mise en compétition des équipes. C’est en travaillant ensemble et dans la plus grande confiance que nous pourrons atteindre l’objectif ambitieux, mais exaltant, de 100 % de réussite, même s’il reste encore à définir ce concept...
Il n’est pas trop tard pour redonner confiance aux enseignants, ce qui est la seule manière pertinente de les engager dans une nouvelle politique éducative au service de la réussite de tous les élèves… mais il est grand temps d’envoyer un signal clair qui ne sera pas démenti ou minimisé par des mesures peu compréhensibles !
Soyez assuré, Monsieur le Ministre, de notre attachement sans faille à un service public d’éducation plus juste et plus efficace.
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