« Les réformes néolibérales des trois derniers quinquennats ont creusé les inégalités. Les gouvernements successifs se sont accommodés de l’échec de milliers d’élèves. Ils ont fait de l’éducation un marché, de l’élève et des parents des client·es, des enseignant·es des exécutant·es, portant atteinte aux principes républicains d’égalité, de gratuité et de laïcité. »
Programme éducatif de Mélenchon, une présentation apocalyptique de la situation
Pour bien enfoncer le clou, Mélenchon accuse l’Ecole d’être « subordonnée aux directives européennes » et de « formater des individus employables, obéissants et adaptés au marché ».
Face à un constat aussi accablant, on se demande comment les cadres et les enseignants, ces hussards de la République, ont pu sans réagir laisser se produire de telles dérives. Leur responsabilité est au moins aussi importante que celle des gouvernements successifs parmi lesquels Mélenchon englobe non sans malice ses anciens compagnons socialistes.
La place de l’enseignement privé
Une vision étrange qui mériterait d’être précisée car le candidat annonce « une carte scolaire intégrant l’enseignement privé et une modulation du financement des établissements privés en fonction de leur respect de la carte scolaire. »
La formation des enseignants
Il est proposé de créer des « écoles professionnelles de l’enseignement », en lien avec le monde universitaire… résurgence des IUFM ou mutation génétique des ESPE ?
Le métier d’enseignant
Dans le primaire est prévu « un temps hebdomadaire autogéré d’1h30, afin de permettre, pendant le service, la concertation et le travail coopératif de l’équipe enseignante. »
On se demande comment ce temps sera pris pendant le service mais sa principale caractéristique sera d’être autogéré, donc non soumis à l’autorité du directeur d’école qui n’aura aucune fonction hiérarchique.
Le principe fondamental sera celui de « la liberté pédagogique » et il sera donc « mis fin aux dispositifs d’évaluation et de contrôle permanent ».
Bien que cette formulation ne soit pas très claire, elle exclut manifestement tout contrôle hiérarchique de la part des corps d’inspection tant en ce qui concerne le travail des enseignants que le travail des élèves. Il est permis de se demander comment sera assuré le caractère national de l’enseignement si aucun regard ne peut être porté sur le fonctionnement des classes.
En doublant le nombre de postes ouverts à l’agrégation interne, on s’inscrit délibérément dans le caractère élitiste et disciplinaire du système pyramidal actuel.
La gouvernance du système
Mélenchon affirme qu’il veut « renforcer le cadre national du service public d’éducation » mais son regard se limite aux examens et aux programmes alors que seul le pilotage du système peut apporter des garanties sur la lutte contre les inégalités comme sur la qualité du service public.
En proposant de « recréer » une instance indépendante chargée de l’évaluation du système éducatif, le candidat se positionne clairement sur deux points majeurs du fonctionnement de l’institution :
- Le refus de la présence au sein de l’Ecole d’un corps de fonctionnaires chargés d’une mission d’évaluation destinée à garantir aux usagers un service de qualité et aux enseignants un accompagnement mais aussi une forme d’indépendance par rapport aux partenaires de l’Ecole (parents et élus)
- Le choix d’une instance externe, sur le modèle libéral anglo-saxon, chargée d’une évaluation dont les objectifs resteront à définir…
Nota : d’autres propositions sont davantage conformes à notre conception de l’Ecole, en particulier la place du travail coopératif, une évaluation qui valorise les progrès des élèves, les perspectives de fin de carrière des enseignants ou le rétablissement des commissions paritaires.
Extraits du programme éducatif de Mélenchon
Les réformes néolibérales des trois derniers quinquennats ont creusé les inégalités. Les gouvernements successifs se sont accommodés de l’échec de milliers d’élèves. Ils ont fait de l’éducation un marché, de l’élève et des parents des client·es, des enseignant·es des exécutant·es, portant atteinte aux principes républicains d’égalité, de gratuité et de laïcité.
Dans le même temps, les finalités de l’école ont été inversées au profit d’une vision minimaliste et utilitariste, subordonnée aux directives européennes qui promeuvent “l’économie de la connaissance”. Alors qu’elle doit éduquer les consciences libres et autonomes des citoyen·nes, l’école s’est vue assigner l’objectif de formater des individus employables, obéissants et adaptés au marché.
Encourager la coopération :
• Maintenir les classes multi-âges, facteur de réussite pour tou·tes les élèves ; encourager les formes coopératives de travail et favoriser le tutorat entre élèves par des pédagogies adaptées et la valorisation des réalisations et des activités collectives
• Privilégier une évaluation qui valorise la progression des élèves
Généraliser la gratuité et garantir la mixité :
• Instaurer une nouvelle carte scolaire mettant fin à la ségrégation scolaire
• Mettre en place un groupe de travail associant universitaires, élu·es locaux, parents d’élèves, syndicats, ministères de l’Éducation nationale, du logement, des transports, chargé d’établir une carte scolaire intégrant les établissements privés
• Moduler le financement des établissements privés en fonction de leur respect de la carte scolaire
Refonder la formation :
• Créer des écoles professionnelles de l’enseignement, en lien avec le monde universitaire
• Appliquer le droit à la formation continue sans autorisation préalable du ou de la chef·fe d’établissement
Reconnaître l’expertise enseignante :
• Alléger la charge de travail : suppression des activités pédagogiques complémentaire (APC) qui s’ajoutent au temps d’enseignement obligatoire en primaire ; libérer dans le 1er degré un temps hebdomadaire autogéré d’1h30, afin de permettre, pendant le service, la concertation et le travail coopératif de l’équipe enseignante
• Abroger la loi Rilhac pour restaurer le fonctionnement collégial dans le premier degré
• Renforcer les garanties statutaires, reconnaître le travail et l’engagement des personnels en réaffirmant la liberté pédagogique et en mettant fin aux dispositifs d’évaluation et de contrôle permanent
• Redonner aux enseignant·es la pleine maîtrise de l’évaluation, en interdisant toute immixtion hiérarchique
; supprimer les évaluations nationales qui ont été imposées aux enseignant·es sans concertation
Offrir des perspectives d’évolution de carrière au plus grand nombre :
• Doubler les postes ouverts à l’agrégation interne
• Rétablir les commissions paritaires pour garantir la défense des droits des personnels et une gestion transparente des carrières et des mutations
Repenser la gouvernance de l’Éducation nationale :
• Recréer une instance indépendante chargée de l’évaluation du système éducatif