Humour grinçant...

ou l'âge du capitaine...

ou encore.

Comme j'envie mon collègue Julien DAZAY... d'être si performant...

 

La publication de l'ouvrage tant attendu sur l'école maternelle me plonge dans un abîme de perplexité. Pour comprendre, je me suis livré à un petit calcul dans ma circonscription.

 

Dans ma circonscription, il y a des professeurs (250), 46% exercent en école élémentaire, 28% en école maternelle, 26% sont remplaçants, personnels de Rased, compléments de temps partiel. La répartition ne doit être très différente dans d'autres lieux.

 

On peut aisément supposer que ces ratios s'appliquent aux inspections faites chaque année. Ainsi, si l'inspecteur fait 80 inspections (et dans ce cas, il ne lui reste pas beaucoup de temps pour faire autre chose que l'administration, les réunions, les formations, etc !), il inspecterait peu ou prou 36 enseignants d'école élémentaire, 22 en école maternelle et 21 « autres » (dont peut-être 5 observés en école maternelle). Il pourrait donc chaque année observer 27 classes maternelles.

 

Sur RTL, on annonce que cet inspecteur a fait 1500 inspections en maternelle, ailleurs on annonce qu'il en a fait 1000. Je suis bien obligé de considérer que ce collègue est très expérimenté et que cela fait, selon les sources, (1000 : 27) soit 37,04 ans d'inspection ! ou selon RTL (1500 : 27) soit 55,56 ans d'inspection !

 

Évidemment, je cherche l'erreur... que je ne peux trouver que dans mon peu d'engagement professionnel. Notre collègue fait beaucoup plus d'inspections, tout apte qu'il est à assurer toutes les missions riches, diversifiées qui sont notre lot quotidien. Allez ! S'il fait 100 inspections par an, cela fait selon les sources 29,85 ans ou 44, 78 ans qu'il est inspecteur, s'il fait 120 inspections, cela fait respectivement 24, 54 ans ou 36,81 ans qu'il exerce notre beau métier (qu'on me pardonne les décimales qui sont importantes pour justifier de ce travail méritoire !).

 

Décidément, il s'agit bien d'un collègue performant, doué d'une forte capacité d'analyse, d'un jugement sans faille, recruté précocement dans le corps des IEN, un de ces hommes brillants qui impriment une trace indélébile dans les territoires dont ils ont la charge ... ou bien, je rêve...

 

Et au réveil, que reste-il donc ?

 

De la malhonnêteté ? De l'incompétence ?

 

Sans doute peut-on considérer que dans certaines classes, on pourrait travailler plus. Cela permet-il de discréditer les centaines de classes où les professeurs innovent, inventent chaque jour de nouvelles situations d'apprentissages, s'approprient des programmes ambitieux (ceux de 2002 ! ) et oeuvrent sans cesse pour les progrès des élèves.

Notre collègue si performant s'interroge-t-il un tant soit peu sur l'impact que ses innombrables visites laissent dans les classes après son départ ? Il juge, discrédite, disqualifie, oubliant qu'il reste un des acteurs essentiels de l'évolution des pratiques. A-t-il oublié les infinitifs qui encadrent notre action : impulser, évaluer, inspecter, animer ? Il avance masqué et demande même que sa voix soit masquée dans les interviews qu'il donne. Gageons qu'un jour, lorsqu'on saura qui il est, d'autres voix s'élèveront pour parler de sa longue action comme inspecteur. On se rappellera que si l'effet-maître est important dans une classe, l'effet-inspecteur l'est de même dans une circonscription.

 

On avait une institutrice clandestine, des directeurs et des enseignants qui prônaient un retour aux instructions de 1923, un chercheur en mal de reconnaissance politique, on a maintenant un inspecteur-pourfendeur des maternelles. Désignons des boucs émissaires, le lycée qui prépare mal à l'université, le collège incompétent pour former de futurs bons élèves de lycée, l'école primaire incapable de former les futurs collégiens, la maternelle où sont gaspillées les chances des élèves. Tout cela continue le travail de sape et de discrédit du Service Public d'Éducation.

 

Je partage alors le conseil donné par mon syndicat : économisons 14€.

 

Jacky COURTAIS.